Vendredi 15h-17h
Les savoirs d’État font l’objet de discours récurrents sur leur caractère théorique et pratique qui varient cependant considérablement selon les éléments qui les constituent. Précocement institutionnalisées dans les universités allemandes, les « sciences camérales » se déploient certes au service de l’Etat, entendu comme la communauté des sujets et dans le cadre de la „police du bien-être“ (Wohlfahrtpolizei) mais aussi à la marge de l’administration : les professeurs qui écrivent des manuels et formalisent cette pédagogie de l’Etat n’ont pas accès aux données administratives et ne sont que rarement des praticiens. Tardivement institutionnalisés en France, les « savoirs d’Etat » sont en revanche souvent directement portés par des administrateurs, parisiens mais aussi provinciaux. Les hésitations du lexique ne sont pas moins grandes. Dans les éditions du Dictionnaire de l’Académie de 1762 et de 1798, le terme de «Science » est décliné selon deux registres, d’une part comme «Connoissance certaine et évidente des choses», et d’autre part comme «connoissance de toutes les choses dans lesquelles on est bien instruit ». Les dictionnaires allemands tendraient pour la première définition („aus ungezweifelten Gründen etwas durch Schlüsse herausbringen“, Zedler). Mais l’éventail du lexique disponible pour caractériser les savoirs et sciences (Gelehrsamkeit, Kunde, Lehre, Wissenschaft) témoigne de la même hésitation qu’en français. Pour autant, les dictionnaires ne donnent qu’un discours parmi d’autres sur le statut épistémologique des savoirs et sur leur lien avec la professionnalisation des administrateurs et/ou des experts. Le séminaire se propose donc de revenir, pour la période 1750-1850, sur le statut épistémologique des savoirs désignés sous le terme de « savoirs d’Etat » en mettant de côté, au moins provisoirement, les processus d’institutionnalisation et les configurations politiques. On mettra donc l’accent sur les acteurs, sur les amalgames et les bricolages qu’ils réalisent, sur la dimension cognitive de leurs pratiques et sur les représentations qu’ils s’en font ou qu’ils en donnent, sur les formes de la rationalité ainsi mise en oeuvre. On suivra également, autant que faire se peut, les modalités du travail des administrateurs en questionnant l’usage des instruments qu’ils élaborent.Programme 2011-2012
14 novembre 2011Pavel Himl
(université de Prague), Projets et pratiques de contrôle et d'identification de la population dans la monarchie des Habsbourg au seuil de la modernité (1750-1800). 2 décembre 2011Lars Behrisch
(Université d’Utrecht/ENS Lyon), Les premières statistiques agraires en France avant la Révolution. 20 janvier 2012André Holenstein
(Université de Berne), Staat und Wissen(schaft) in der Neuzeit. Ansätze in der neueren Forschung. 3 février 2012Borbála Zsuzsanna Török
(Université de Constance), "Speak of me as I am:" adaptations of statistics in Hungary in the framework of imperial reforms, late 18th - early 19th centuries. 23 mars 2012Catherine Dunlop
(Montana State University), Au-delà de l’Etat : la cartographie contestataire du public européen au dix-neuvième siècle. 4 mai 2012Moritz Isenmann
(Université de Cologne / IHA, Paris), Un ‘ordre naturel‘ - Colbert et le commerce international dans la seconde moitié du 17e siècle.Organisateurs
Morgane LABBE (EHESS), Isabelle LABOULAIS (Université de Strasbourg), Christine LEBEAU (Paris I), Lothar SCHILLING (Université d’Augsbourg), Jakob VOGEL (Université de Cologne)Lieu
Bibliothèque d’Histoire Moderne, CRHM, Sorbonne (esc. R, 2e étage).
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