Appel à communications
« La comparaison est une démarche naturelle de l'esprit. Il n'y a rien de plus spontané que d'apprécier les hommes, les idées ou les choses en fonction d'autres hommes, d'autres idées, d'autres choses. Toute connaissance a besoin de points de repère. La comparaison scientifique puise son sens dans ces prémices universelles, même si elle se situe à un tout autre niveau d'élaboration conceptuelle. On compare pour évaluer plus objectivement sa situation en tant qu'individu, collectivité ou nation »
Dogan, Pelassy, 1981, p. 7
La comparaison est l'un des outils méthodologiques les plus usités en sciences humaines et sociales (SHS), et l'espace de recherche franco-allemand en est un exemple saisissant. Les différentes sciences humaines et sociales ont cependant fait preuve d'un dynamisme inégal à proposer des méthodes comparatistes. Face au constat global que « le foisonnement des recherches comparées contraste singulièrement avec le peu de réflexion méthodologique sur l’usage et l’élaboration de la comparaison » (Vigour, 2005), ce colloque junior se veut être un jalon dans la réflexion méthodologique sur la comparaison. Il entend pour cela partir de la comparaison France-Allemagne, une combinaison dont la popularité est portée par les relations intenses que les deux pays ont développées depuis plus d’un demi-siècle. À partir de travaux de jeunes chercheur.euses de SHS s’inscrivant dans une démarche comparatiste franco-allemande, le colloque souhaite mener une discussion réflexive sur la comparaison : la comparaison peut être un puissant outil heuristique (axe 1), mais elle peut aussi être abordée comme un objet de recherche en tant que tel (axe 2). Enfin, ce colloque junior propose un espace de discussion pour des projets comparatistes en début d’élaboration. Il offre ainsi à de jeunes chercheur·euses la possibilité de présenter leur projet à d’autres plus expérimenté·es et ainsi de parfaire l’élaboration de leur stratégie de comparaison (axe 3).
Axe 1 - La comparaison comme outil méthodologique
Ce premier axe est consacré aux aspects méthodologiques à prendre en compte dans l’élaboration d’une comparaison internationale. Bien que largement utilisée en SHS, la comparaison se doit d'être soigneusement justifiée. Cet enjeu apparaît particulièrement crucial dans un contexte où la comparaison France-Allemagne s’est banalisée. Dans cette optique, le premier axe du colloque souhaite revenir sur des questions communes à toute comparaison internationale en SHS : comment justifier la pertinence d’une comparaison ? Comment naviguer entre les différents écueils de la démarche comparatiste (universalisme et localisme culturel par exemple) ? Au-delà de ces considérations fondamentales, les organisateur·ices encouragent les communications qui se focalisent sur des difficultés rencontrées à différentes étapes du processus de recherche. La proximité géographique entre la France et l’Allemagne n’empêche pas l’existence de grandes disparités dans l’organisation administrative des deux pays, par exemple dans la collecte de données statistiques nationales. Ainsi, comment gérer des accès aux sources qui peuvent varier d’un pays à l’autre ? Que faire de l’hétérogénéité des données qui peut découler de systèmes de classification différents par exemple ? Enfin, dans le temps de l’analyse et de la rédaction, se posent de nouvelles difficultés : comment arbitrer de la comparabilité de certaines catégories ou concepts ? Quels sont les enjeux qui se posent en matière de traduction et de traductibilité ? Doit-on construire une comparaison terme à terme, de manière isolée ? Ou tenir compte des circulations et influences mutuelles, et si oui, comment ?
Nous souhaitons également susciter des contributions questionnant la place de la « culture » dans l’explication comparatiste : à quel point peut-on renvoyer l’explication d’un phénomène étudié à une soi-disant « culture » nationale ? Le colloque souhaite ici affronter l’écueil de moultes études comparatistes faisant de la « culture » d’un pays, d’une communauté, etc. un facteur explicatif des différences mises au jour par la comparaison. Plutôt que de faire de la culture une « boîte noire » explicative, il s’agirait de la déconstruire et d’en faire un objet d’étude (Labit et Thoemmes, 2003). Nous invitons ainsi les communications qui, partant d'un objet d'étude a priori ancré dans un cadre national-étatique, démontrent les intérêts d'une comparaison internationale pour enrichir la thématique de départ.
Axe 2 - La comparaison comme objet d’étude
Alors que le premier axe interroge le « comment » de la comparaison, il s’agit ici d’en questionner le « pourquoi ». Qui compare et pourquoi ? Le deuxième axe du colloque invite les candidat·es à regarder la comparaison comme un objet d'étude (Bartel et al., 2021). Il peut s'agir d'une part de comparaisons dites « profanes », produites et mobilisées par des acteur·ices que le/la chercheur·euse étudie. Se pose alors la question des usages qui sont faits de la comparaison. Quelles significations revêtent les comparaisons pour les acteurs·ices qui les développent ? Comment le/la chercheur·euse se positionne-t-il/elle face à elles et comment peut-il/elle les analyser ? Face à ces questionnements, nous accueillons des communications qui s’intéressent aussi aux contextes dans lesquels sont produits les comparaisons qu’aux acteur·ices qui les produisent.
D'autre part, nous encourageons les communications qui, dans un effort autoréflexif, interrogent le regard comparant du/de la chercheur·euse. Comment ce/cette dernier·ère en arrive-t-il/elle à la comparaison ? Comment son regard est-il construit ? Quels biais intègrent-il ? Nombre de chercheur·euses adoptant une approche comparatiste France-Allemagne s’inscrive dans un espace franco-allemand de la recherche et ont eux/elles-mêmes des trajectoires « franco-allemandes ». En quoi prendre en compte ces dernières du/de la chercheur·euse peut-il s’avérer fécond pour déconstruire son regard comparatiste ? Quelle place accorder à la trajectoire professionnelle et personnelle du/de la chercheur·euse dans l'analyse de son regard ?
Axe 3 – Débuter un projet comparatiste France-Allemagne : présentation et discussion de projets comparatifs en cours d'élaboration
Le dernier axe s'adresse à des participant.es au début de leur projet de recherche (doctorat/post-doctorat) qui souhaiteraient avoir un retour critique sur les premières étapes de leurs travaux. La présentation de résultats n'est donc pas nécessaire pour cet axe, mais il est demandé aux candidat.es d'envoyer un projet de recherche faisant clairement apparaître l'intérêt et les enjeux de la perspective comparative franco-allemande proposée, mais aussi les doutes et les hésitations à mettre en discussion.
L'idée centrale de cet axe est d'expliciter pour chaque projet la pertinence du recours à la comparaison comme outil au regard de la problématique posée.
Pour cet axe, des précisions quant à l’état d’avancement du projet sont attendues. Pour cela, la date de début de la thèse ou du post-doctorat devra être mentionnée dans la proposition.
Modalités de candidatures
- Public visé : doctorant·es et post-doctorant·es en SHS (histoire, sociologie, droit, science politique, géographie, psychologie sociale, philosophie...) ayant une approche comparatiste franco-allemande dans leur recherche. Une maîtrise au moins passive de l’allemand et du français est demandée.
- Propositions à envoyer : L’envoi d’une communication écrite est demandé en amont (paper-based) : 3000 signes, en français, allemand ou anglais. À envoyer à colloque.comparaison@gmail.com pour le 15.09.2023 au plus tard. Les candidat·es recevront une réponse au cours du mois d’octobre.
- Les deux premiers axes sont conçus à partir d'articles (paper-based). Une élaboration écrite, mais plus courte, est également attendue pour le troisième axe. Les participant.es seront invité.es environ trois semaines avant le colloque à soumettre leurs articles afin qu'ils puissent être diffusés.
Aspects pratiques
25.01.24: Maison Interuniversitaire des Sciences de l'Homme - Alsace (MISHA), Strasbourg
26.01.24: Freiburg Institute for Advanced Studies (FRIAS), Fribourg-en-Brisgau
Frais de transports : prise en charge jusqu’à 100€ pour se rendre au colloque (aller vers Strasbourg, retour depuis Fribourg). Le transport collectif de Strasbourg à Fribourg le matin du 26.01.24 est pris en charge.
Frais d’hébergement à Strasbourg : prise en charge jusqu’à 50€
Comité d'organisation
Jeanne Gaillard, doctorante, UMR 7363 SAGE Université de Strasbourg
Kira Renée Kurz, doctorante, UMR 7363 SAGE Université de Strasbourg/Albert-Ludwigs-Universität Freiburg
Guillaume Placide-Breitenbucher, doctorant, UMR 7363 SAGE, Université de Strasbourg
Elise Wolfermann, doctorante, UMR 7363 SAGE, Université de Strasbourg
Comité scientifique
Kevin Clementi (doctorant en psychologie sociale, UMR 7363 SAGE Université de Strasbourg)
Karim Fertikh (MCF en science politique, UMR 7363 SAGE Université de Strasbourg/Sciences Po Strasbourg)
Hannes Käckmeister (Docteur, science politique/travail social, IAE Nancy/UMR 7363 SAGE Université de Strasbourg)
Amélie Kratz (doctorante en histoire contemporaine, UMR 7363 SAGE Université de Strasbourg)
Valérie Lozac’h (PU en science politique, UMR 7363 SAGE Université de Strasbourg)
Jay Rowell (DR en sociologie, UMR 7363 SAGE Université de Strasbourg/CNRS)
Prof. Dr. Frieder Vogelmann (Epistemologie/Philosophie, University College Freiburg)
Prof. Dr. Uwe Wagschal (Vergleichende Politikwissenschaft, Albert-Ludwigs-Universität Freiburg)
Date
-Délai
Lieu
Maison Interuniversitaire des Sciences de l'Homme - Alsace (MISHA), Strasbourg
Freiburg Institute for Advanced Studies (FRIAS), Fribourg-en-Brisgau