Tout au long du XXe siècle, les universités et les administrations américaines ont peu à peu monopolisé la production de savoirs économiques légitimes. Elles ont été rapidement suivies par leurs homologues d’Europe occidentale et, plus tard, par le reste du monde. Ces institutions et les experts universitaires qui y travaillent se sont approprié les positions à partir desquelles ces savoirs sont produits, ainsi que les moyens d’imposer leurs codes et les contenus d’un discours économique légitime. Ce faisant, elles ont introduit une hiérarchie au sein du monde académique et entre le monde académique et le monde non académique. Elles détiennent l’autorité pour encadrer les controverses sur l’analyse des dynamiques économiques et la manière dont celles-ci peuvent être orientées par les politiques publiques. La compétence économique étant devenue essentielle dans la gouvernance à l’échelle globale, la recherche s’est principalement concentrée sur la manière dont ces économistes professionnels ont acquis une emprise décisive sur ce processus politique.
La conférence se penchera sur les processus de marginalisation qui sont la contrepartie de cette monopolisation. Elle vise à déplacer notre regard du domaine de ce qui est accepté et légitime en termes de savoirs économiques vers les formes de connaissance qui ont été mises à l’écart et dévalorisées.
Comment peut-on caractériser les marges de la connaissance économique, qui sont les actrices et les acteurs situés à ces marges, comment évoluent-elles dans le temps ? Surtout, nous nous demanderons comment l’analyse des marges du savoir économique peut contribuer à combler le fossé entre l’économie entendue d’un point de vue pratique comme les processus de production, de consommation et d’échange, et l’économie comme discipline académique qui modélise et analyse ces processus.
Comité d’organisation
Pierre Alayrac, Maître de conférences en science politique, Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis
Simon Godard, Maître de conférences en histoire, Sciences Po Grenoble - UGA
Tobias Rupprecht, Docteur en histoire, coordinateur scientifique du groupe de recherche « Peripheral Liberalism », Université Libre de Berlin